LyonCapitale.fr, 31.03.07
Tintin et Haddock causent le patois (2007-03-31 10:25:40)
Linguistique. Pour le centenaire de la naissance d’Hergé, Les Aventures de Tintin sont traduites en arpitan, joyeux mélange de patois lyonnais, savoyard, vaudois et valdôtain.
Tintin : “Vito, capitèno, alens fére un torn diens lo parc” Capitaine Haddock : - “D’acôrd, je vuel quèrre d’abôrd des lampes-tôrches, et veno avouéc.” (1)
Mile milyârds de tonêrros, quel étrange Tintin débarque à Lyon ? Dès le 31 mars, pour fêter ses 100 printemps, le célèbre reporter à la houpette rousse se met à causer le patoué savoyâ , comprenez le patois savoyard. Quant au capitaine Haddock et sa légendaire humeur atrabilaire, il tchatche lo parlâ liyonê (le parler lyonnais). Rajoutez à ces deux patois, le vaudois et le valdôtain, secouez et vous obtenez les premières aventures de Tintin en arpitan.
Jusqu’au début du XXe siècle, cette langue fût couramment parlée dans une zone correspondant, en gros, à la région Rhône-Alpes et aux régions frontalières de Suisse et d’Italie (voir carte). Au nord, on parlait la langue d’oïl, et au sud, l’occitan. La langue a (quasiment) disparu avec l’arrivée de la bourgeoisie qui s’est mise à parler français.
60 000 patoisants en Rhône-Alpes
Parmi les 24 albums des Aventures de Tintin, c’est “L’Affaire Tournesol” qui a logiquement été choisie pour devenir L’Afére Pêcard (en hommage au professeur suisse Auguste Piccard qui a servi de modèle à Hergé pour créer Tournesol).
L’histoire se situe en effet dans les environs de Lyon et les bords du Léman. Seule “fausse note” historique, Molinsârd a été téléporté dans les monts du lyonnais, en lieu et place du château de Pluvy, pour justifier que Haddock parle lyonnais.
“Les langues ont une dimension affective et font partie de la mémoire collective, explique Eric Varnay, enseignant-chercheur à Saint-Étienne, l’un des trois auteurs du livre. L’objectif est de montrer que l’arpitan n’est pas mort et qu’il suscite encore de l’intérêt”, à l’heure de la mondialisation de l’anglais ou de l’espagnol.
Aujourd’hui, en Rhône-Alpes, 60 000 personnes parlent encore ces différents patois, 200 000 avec les cantons Suisses, le val d’Aoste et le Piémont. “C’estgrâce à Tintin, et son caractère mythique, qu’une population peut mettre en valeur son dialecte et ses traditions” ajoute Étienne Pollet, éditeur des collections Hergé chez Casterman.
Un Lucky Luke et un Gaston devraient aussi être traduits en arpitan d’ici quelques mois.
(1) “vite, capitaine, allons faire un tour dans le parc”
-”D’accord, je vais d’abord chercher des lampes-torches, et je viens avec vous”
Auteur : Guillaume Lamy
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